Esthétique et biologie parodontale : les rapports parodonto-prothétiques

Esthétique et biologie parodontale : les rapports parodonto-prothétiques

par Philippe Viargues

 

LA SANTÉ PARODONTALE est l’un des facteurs clés de la réussite esthétique de la prothèse fixée. Celle-ci ne peut s’envisager qu’en présence d’un parodonte sain ou assaini. Mais, aussi bien faite soit-elle, une prothèse fixée constitue toujours un facteur perturbant pour le parodonte. Afin d’assurer la pérennité temporelle ou esthétique des reconstructions prothétiques, il est indispensable d’intégrer un certain nombre de réflexions et de choix à nos décisions thérapeutiques.

Au-delà de la forme ou de la teinte d’une dent prothétique, le rendu esthétique est directement lié à l’absence d’inflammation et à la présence des papilles inter-dentaires. La tendance de la prothèse actuelle est nettement orientée vers la recherche d’un rendu esthétique maximal, quitte, parfois, à sacrifier certains des principes biologiques chers aux parodontistes. Quand ces conditions ne sont pas remplies, toutes les concessions à la biologie se traduisent par une augmentation du risque de développement d’une pathologie parodontale et, à court terme, par la perte du rendu esthétique qui a motivé lesdites concessions. Le respect de la biologie et de son corollaire – éviter toute source d’inflammation gingivale – permet d’obtenir un résultat au moins aussi satisfaisant et bien plus fiable dans le temps.

Le parodonte superficiel est extrêmement fragile et tout ce qui peut le protéger ou au moins le préserver est à considérer. La première réflexion à prendre en compte concerne la position des limites de préparation. Selon les études les plus récentes, la zone où se situent habituellement les limites de préparation n’est visible qu’au niveau antéro-supérieur et chez 20 % de la population, même en présence d’un sourire forcé. Face à cette statistique, il est légitime de se poser la question du choix de la position des limites de préparation. Pourquoi enfouir les limites de préparation dans le sillon quand il n’y a aucune obligation de le faire, en sachant que cela ne présente que des inconvénients (agression du sillon et parfois du système d’attache, préparations plus délicates, empreintes plus difficiles et adaptation plus difficilement contrôlable) ? De plus, il est acquis qu’avec les procédés céramo-céramiques, les limites juxtagingivales offrent le même rendu esthétique.

A contrario, ces mêmes études montrent que les embrasures et les papilles sont, quant à elles, visibles dans 80 % des cas. C’est pourquoi la gestion des embrasures reste une question majeure pour l’obtention d’une esthétique correcte. Les solutions proposées, à la suite des travaux de Tarnow, sont fondées sur une idée fausse et ont pour résultat l’obtention d’une papille le plus souvent inflammatoire. Malheureusement, l’échec de toutes les techniques afin de recréer une papille saine oblige dans ces cas à certains compromis. Mais, compromis ne signifie pas « n’importe quoi »… La mesure reste de rigueur si l’on souhaite conserver une approche biologique de l’esthétique en prothèse fixée. Tout patient, toute bouche, toute dent sont différents. Chaque cas est un cas particulier et doit donc être abordé en tant que tel.

 

 

Légendes des 4 photographies :

n°1 - Cas avant traitement (avril 2006).

n°2 - Limites supragingivales (février 2011) après traitement céramo-céramique 21 et facette céramique 22.

n°3 - Scellement de 3 éléments céramométalliques. Limites supra ou juxtagingivales, embrasures ouvertes 6 mois après une greffe de conjonctif.

n°4 - Résultat après 3 ans.