Endocrinologie : prise en charge des patients à risque

Endocrinologie : prise en charge des patients à risque

par Hervé Tarragano, Lofti Benslama et Philippe Casamajor.

 

Patients diabétiques

Le diabète sucré est caractérisé par un taux élevé de glucose dans le sang et un métabolisme déséquilibré lié à un défaut de production ou de sécrétion de l’insuline. Il existe trois types de diabète :

Le type 1 ou insulinodépendant. D’origine génétique, il se manifeste dans l’enfance et est lié à la destruction auto-immune de cellules pancréatiques qui produisent l’insuline.

Le type 2 se manifeste tardivement. Il est plutôt favorisé par l’obésité et le manque d’exercice, ne nécessite pas d’administration d’insuline, mais peut être contrôlé par l’alimentation et l’exercice.

 

Le type 3 est le diabète gestationnel. Les éléments diagnostiques sont une glycémie élevée (> 11,1 mmol/l) et le dosage d’hémoglobine glyquée. La maladie provoque l’accélération de la formation des athéromes avec des conséquences importantes au ni veau des gros vaisseaux (risque élevé d’AVC, infarctus, amputation du pied) et des petits vaisseaux (rétine, reins, système nerveux).

Au niveau oral, le patient diabétique présente un retard de cicatrisation, un risque infectieux élevé, des ulcérations persistantes, une prédisposition à la maladie parodontale, aux caries, aux candidoses et au lichen plan.

Pour les patients équilibrés et contrôlés, il n’est pas nécessaire de prendre des précautions particulières ; ceux-ci peuvent être soignés normalement, et la pose d’implant peut être envisagée. Il est conseillé d’effectuer les soins le matin après le petit déjeuner et d’éviter, au mieux, le stress, qui pourrait déclencher une crise d’hyperglycémie. Afin de diminuer le stress, il est possible d’administrer des benzodiazépines, de l’hydroxyzine ou du protoxyde d’azote. En raison du risque infectieux, il est important de

  suturer les sites d’extraction et d’expliquer au patient les précautions d’hygiène orale.

Dans le cas des patients non équilibrés, les traitements doivent être réalisés sous antibioprophylaxie. Par ailleurs, la prescription de corticoïdes et d’acide salicylique est déconseillée.

 

 

 

Dysfonctionnement thyroïdien

 

Les glandes thyroïdiennes produisent deux hormones, T3 et T4, qui jouent un rôle important dans l’homéostasie calcique. L’hypothyroïdie est une pathologie de défaut de production de ces hormones, qui peut être primaire ou secondaire à une pathologie hypophysaire. Cette maladie implique un ralentissement général du fonctionnement de l’organisme. Au niveau oral, elle se manifeste par une langue volumineuse, une hypertrophie gingivale, une respiration buccale et un retard dans l’éruption dentaire.

L’hyperthyroïdie, au contraire, est caractérisée par un taux élevé de T3 et T4. Elle provoque une accélération globale du métabolisme, une insuffisance cardiaque, une perte de poids et une exophtalmie. Il n’existe pas de contre-indications aux traitements dentaires chez les patients à risque faible, équilibrés et qui ont consulté dans les six mois.

Pour les patients hyperthyroïdiens à risque modéré, il est préférable d’éviter l’utilisation de vasoconstricteurs. Par ailleurs chez ces patients, la persistance de foyers infectieux peut provoquer une crise thyrotoxique. Il est préférable de ne pas leur administrer de barbituriques ou de narcotiques. En revanche, les patients à risque élevé doivent être pris en charge en milieu hospitalier.

 

 

 

Maladies hépatiques

Le foie est responsable de la quasi-totalité du métabolisme biochimique de l’organisme. La majorité des maladies hépatiques est provoquée par l’abus d’alcool. Plus rarement, l’étiologie est virale, génétique, auto-immune ou médicamenteuse. Les signes diagnostiques prédominants d’un dysfonctionnement hépatique sont l’ictère (coloration pathognomonique jaune de la peau et de la conjonctive) et un retard de cicatrisation.

Il existe cinq types d’hépatites virales : A, B, C, D et E. Ces maladies sont particulièrement préoccupantes en raison de leur important risque de contamination. Lorsque le patient atteint se présente en phase aiguë, tous les soins non urgents sont contre-indiqués et le patient est adressé en milieu hospitalier.

Si le patient est en phase chronique, il est conseillé de consulter le médecin traitant et de prendre connaissance des examens biologiques. Ces patients présentent un risque de saignement, d’anémie, de thrombocytopénie et de neutropénie. La fonction hépatique également est diminuée. Il faut donc éviter les prescriptions à métabolisme hépatique comme le paracétamol et les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et leur préférer l’acide salicylique. À titre professionnel, il est important d’avoir été vacciné et de contrôler régulièrement son taux d’anticorps (AC > 50 UI/ml).

 

Ulcère gastroduodénal et reflux oesophagien

10% de la population est affectée par cette pathologie, laquelle est favorisée par le stress, le tabagisme et les AINS. Tous les soins dentaires sont possibles à condition de minimiser le stress lors de l’intervention et d’associer à nos prescriptions des antiacides (Ultra-levure).

 

Insuffisance rénale chronique

Les patients atteints de cette maladie présentent une prédisposition aux infections, un risque élevé de saignement, d’anémie et d’HTA. Il est conseillé de se rapprocher du médecin traitant et d’éviter les soins en situation d’instabilité. Les agents néphrotoxiques tels que l’acide salicylique, les AINS et l’aciclovir sont à éviter. De façon générale, il faudra ajuster le dosage des prescriptions ou espacer les doses de prise.

 

Pathologies surrénaliennes

Les glandes surrénales produisent trois types d’hormones :

• les glucocorticoïdes responsables de l’équilibre hydroélectrique et de la réponse immunitaire ;

• les minéraux corticoïdes ;

• les androgènes.

Un patient peut présenter un hyperadrénalisme pour des raisons génétiques (maladie de Cushing) ou par l’apport chronique de corticoïdes exogènes. Ces patients sont sujets à l’hypertrophie gingivale et aux infections bactériennes. Il est recommandé de prescrire une prémédication anti-infectieuse avant les soins et une augmentation de la dose de corticoïdes en flash afin d’aider le patient à faire face au stress.

 

 

Légendes des Photos :

Photo n° 1 : Ulcérations dues au diabète.

Photo n° 2 : Candidose et polycaries associées à une sécheresse buccale dues au diabète.

Photo n° 3 : Le diabète constitue un facteur de risque avéré des maladies paradontales.

Photo n° 4 : Une langue volumineuse en protrusion peut constituer une manifestation de l'hypothyroïdie.

Photo n° 5 : L'hypertrophie gingivale et labiale peut être une manifestation buccale de l'hypothyroïdie.

Photo n° 6 : Des dépôts de mélanine sur les muqueuses buccales peuvent être une conséquence d'un désordre surrénalien.

 

 

Conférenciers : Hervé Tarragano, Philippe Casamajor, Lofti Ben Slama et Yvon Roche

Sujet : Endocrinologie : prise en charge des patients à risque

CR Journée "Patients à risque" SOP 11 mars 2010 - publiée pages 42-43 du JSOP / n°7 / septembre 2010