Désapprendre, apprendre

Philippe Milcent (rédacteur en chef du JSOP)

Publié le mercredi 31 août 2022

« Sortir de sa zone de confort constitue un effort: notre cerveau est paresseux »
Philippe Milcent

Le monde change, c’est une évidence. Mais c’est une illusion de penser que les bouleversements d’aujourd’hui seraient plus importants que ceux de jadis. Le monde a toujours changé, il a toujours été en perpétuel mouvement car la vie, c’est tout sauf l’immobilisme.

Une autre illusion est de supposer que tout changement constitue un progrès, au motif que tout progrès serait un changement. Dernière erreur enfin, celle de l’immobilisme, consistant à affirmer « C’est comme ça, ça a été et ça sera toujours comme ça ». On appelle cela le biais de statu quo.

Pour éviter les conflits intérieurs, notre cerveau a besoin de certitudes.
Il veut donner une explication à tout et, lorsqu’il ne comprend pas ou ne sait pas, il invente, il imagine, il croit, afin de se reposer sur ses convictions. L’arme absolue contre cette dérive s’appelle la connaissance, l’apprentissage et la formation. Cela suppose de sortir de sa zone de confort, et cela constitue un effort infini. Le biais (encore un !) d’inertie et du moindre
effort nous freine dans cette démarche car notre cerveau est économe, pour ne pas dire paresseux.

Pour apprendre, il faut d’abord commencer par désapprendre. Déverser le savoir comme l’eau d’un arrosoir dans le seau d’un apprenant n’a que peu d’intérêt. On sait que dans le meilleur des cas, notre attention se relâche au bout de 20 minutes, et ce qui reste d’une conférence n’excède pas 20 % de son contenu.

On sait aussi que la quantité la plus importante de nos opérations mentales se déroule hors de notre conscience (1). Il est donc illusoire de penser que l’intégralité d’un enseignement « magistral » sera assimilée par les apprenants. Le processus de découverte et d’apprentissage est beaucoup plus complexe. Il passe par quatre stades : la préparation, l’incubation, l’illumination et la vérification (2).

Enfin, il est clairement établi que l’on apprend mieux de ses erreurs. Prenez un enfant qui apprend à marcher. Il n’existe pas de Petit manuel du bien marcher. C’est l’interactivité et le tâtonnement, contrôlés et guidés, qui forment la méthode la plus efficace pour apprendre et progresser. Je fais, je me trompe, je corrige, je recommence et je fais correctement cette fois.

La SOP, avec l’aide de spécialistes en psychologie cognitive et en pédagogie, met au point un système innovant d’apprentissage.
Chacun pourra recevoir, prendre et donner, se tromper, recommencer et finalement, savoir.
À suivre !

Philippe Milcent,
rédacteur en chef du JSOP

(1) Stanislas Dehaene Le Code de la conscience, éd. Odile Jacob, 2014.
(2) Jacques Hadamard, An Essay on the Psychology of Invention in the Mathematical Field,
édition Princeton University Press.

Source : éditorial, page 3 du Journal de la SOP n°6 septembre 2022  

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