Job dating

Marc Roché (président de la SOP)

Publié le mardi 28 juin 2022

L’université-entreprise, en incitant à la multiplication de DU payants, a donné des idées.
Marc Roché

Avec le mois de juillet, s’achèvera la majorité des cycles 2022 de la SOP. Une fin qui coïncide avec la fin de l’année scolaire et universitaire. À l’heure des bilans, les uns et les autres envisagent la rentrée. Pour la SOP, c’est le lancement des inscriptions aux cycles 2023, leur organisation et le constat que leur fréquentation ne se dément pas, qu’ils attirent – satisfaction – de plus en plus de jeunes praticiens venant chercher des conseils de cliniciens compétents et disponibles qu’ils n’ont peut-être pas su trouver au cours de leur formation initiale.


À cet égard, la situation dans le secondaire, prélude à l’Université, ne manque pas d’intérêt. On y parle d’une désaffection et d’une pénurie d’enseignants conduisant l’Éducation nationale à un recrutement accéléré. Qualifiée péjorativement de job dating par une presse unanime stigmatisant l’absence de formation spécifique au métier d’enseignant de ces recrues au rabais, elle inquiète.

Des difficultés de recrutement, les UFR d’odontologie en rencontrent aussi avec la création ex nihilo, sur décision gouvernementale, de huit nouveaux sites universitaires en province pour la rentrée prochaine. Comment et qui recruter alors qu’on assiste déjà à une véritable fuite des cerveaux dans nombre de facultés avec les démissions de MCU et de professeurs temps-plein, amers et déçus ? Là encore, ce sont toujours les meilleurs qui s’en vont en premier ! Pour les remplacer, aura-t-on recours aussi à du job dating au mépris de conséquences qui aggraveraient le niveau de formation initiale ?

Quant aux démissionnaires, par le passé, quand ils ne renonçaient pas à l’enseignement pour se consacrer à un exercice privé, longtemps ils ont rejoint des sociétés scientifiques comme la SOP, qu’ils étoffaient de leurs compétences tout en retrouvant un espace de transmission. Aujourd’hui, avec leurs titres et en tant que leaders d’opinion, ils comptent suffisamment de followers pour être davantage que de simples influenceurs : ils choisissent de créer leur formation.

À l’évidence, c’est le retour de l’enseignement privé, des Écoles dentaires d’avant 1968. Une tendance fortement amorcée au sein des facultés avec l’Université-entreprise qui a donné des idées en incitant à la multiplication des DU payants devant assurer un autofinancement. À effectif constant et avec l’ajout d’un troisième cycle d’odontologie, la tâche d’assurer toutes les missions était devenue impossible. Ainsi, la formation initiale a souvent été délaissée au profit des DU, ouvrant la voie à un concert de formations privées qui parachèvent une formation que le diplôme ne suffit plus à donner.

La SOP qui, elle, a su conserver son éthique, celle d’une formation indépendante des intérêts personnels, voit ainsi, à son corps défendant, une nouvelle fréquentation. Bien sympathique.

 

Marc Roché,
Président de la SOP
 

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