Deux poids deux mesures

Marc Roché (président de la SOP)

Publié le mardi 29 juin 2021

« Le brouillard opaque de l'activité des centres dentaires »
Marc Roché

 
C’EST EN REMERCIANT
à juste titre Olivier Cyran qu’Anne-Charlotte Bas conclut sa tribune parue dans Le Monde du 6 juin dernier (1). L’auteur de Sur les dents, avec ce livre, lui a en effet donné l’occasion de faire connaître, dans le quotidien du soir, certaines conclusions de sa thèse de doctorat (2). Depuis des mois, Olivier Cyran a largement eu l’occasion de faire la promotion d’un livre, critiquable sur bien des points, dans des médias souvent complaisants.

Mais nulle objection sérieuse n’avait pu être opposée à l’enquête partielle et partiale qu’il a menée. Sur un vrai sujet, celui des difficultés d’accès aux soins dentaires, se confrontent donc deux démarches distinctes. Celle, orientée et pleine de certitudes, d’un journaliste bombardé essayiste par la presse et celle, méthodique, d’une universitaire via les résultats de sa thèse de doctorat en économie de la santé, et donc validée par des pairs.

Bien qu’il soit sain que ce sujet soit abordé selon divers points de vue, car tous constituent un apport, soyons convaincus qu’ils n’ont pas la même valeur… Malgré cela, si l’on en juge d’après les réactions de nos confrères, il n’est pas certain que les arguments développés par Anne-Charlotte Bas, chiffres à l’appui, ont bien pesé du poids qui aurait dû être le leur aux yeux des lecteurs compulsifs que sont devenus nombre d’entre nous à l’ère du numérique et des réseaux sociaux.

Sur Facebook, une majorité de réactions ont fait une fois de plus la démonstration que la plupart lisent avec des idées préconçues, à tel point qu’un administrateur de la SOP s’est vu contraint d’intervenir dans ce « débat-dans-le-débat ».
 

RASSURONS DONC nos confrères. 
Anne-Charlotte Bas n’écrit pas que la seule barrière de l’accès aux soins bucco-dentaires est financière mais, comme chacun sait, que c’est l’un des facteurs parmi d’autres ! Nullement antilibérale, elle affirme au contraire que ce mode d’exercice « encourage la production d’un travail de qualité » et que les centres de santé basent leur rentabilité sur du quantitatif tout en étant moins encadrés que les praticiens libéraux.

Alors que les datas des libéraux sont exploitées individuellement via les cartes de professionnels de santé, les centres de santé ont la possibilité de déclarer le brouillard opaque de leur activité globale. Cela constitue un obstacle à un travail statistique qui permettrait une démonstration plus nette encore de l’incidence de statuts différents sur les paramètres déterminants du qualitatif et du quantitatif.

Devant la prolifération de ces centres, il est temps d’en exiger plus de transparence afin que soient donnés les moyens aux chercheurs de décrypter utilement, pour notre profession et nos patients, les traces de leur mode de fonctionnement ! »
 

Marc-François Roché,
Président de la SOP

(1) « La barrière majeure d’accès aux soins bucco-dentaires est financière », tribune parue dans Le Monde daté du 6 juin dernier.

(2) Le marché des soins bucco-dentaires en France, 2018.

Source : Journal de la SOP n°5 juillet 2021 
 

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