Traitement de récessions multiples : la greffe tissulaire sans prélèvement

 

Traitement de récessions multiples : la greffe tissulaire sans prélèvement

 

par Sofia Aroca

  

 

  

  

  

Les techniques le plus souvent utilisées pour traiter les récessions multiples sont, d’une part, les techniques avec lambeau avancé coronairement modifié ou lambeau enveloppe avancé coronairement, lesquelles nécessitent l’incision des papilles et, d’autre part, les techniques faisant appel à un lambeau tunnélisé supra-périosté et un tunnel avancé coronairement modifié (TACM) qui, elles, dans la majorité des cas, n’exigent pas l’incision des papilles. La nouvelle technique présentée vise à substituer une membrane Mucograft® au greffon de tissu conjonctif (GTC) utilisé dans les autres techniques.

 

Si l’objectif consiste à éviter (ou limiter) une aggravation des récessions sans modifier le biotype gingival, un recouvrement partiel de la surface radiculaire est acceptable. En revanche, si l’objectif porte sur le traitement des sensibilités et l’esthétique, il faudra recouvrir à 100 % les surfaces radiculaires.

 

Avant toute intervention, il est important d’évaluer le risque chirurgical dans lequel interviennent quatre facteurs, selon Daniel Étienne :

 

• les dents : proéminences, proximités radiculaires ou encombrements ;

• les tissus : mous, épais ou fins ;

• l’os : déhiscences, fenestrations, présence des corticales, hauteur ;

• le patient : état de santé générale, maladies systémiques, santé parodontale, niveau d’hygiène, etc.

 

 

Ces éléments permettent de poser l’indication de la technique la plus appropriée ou de contre-indiquer toute intervention. La technique du lambeau tunnélisé supra-périosté se décrit comme suit. Une enveloppe supra-périostée de demi-épaisseur de 3 à 5 mm est réalisée sur tissus épais. Quand les tissus sont fins, l’enveloppe est muco-périostée. On ne libère pas les tissus au-delà de la ligne muco-gingivale (LMG) si l’on dispose d’une large bande de tissu kératinisé. Les papilles sont tunnélisées de façon à pouvoir glisser une membrane, selon la technique du passe-lacet, et une greffe de 1,5 mm d’épaisseur est réalisée. La greffe est attachée à la papille par des sutures de matelassier et le tissu conjonctif peut être exposé.

 

La technique du TACM diffère par certains points. L’enveloppe est périostée, le vestibule libéré au-delà de la LMG ainsi que les sommets des papilles ; la greffe peut être moins épaisse (1-1,5 mm), plus ou moins attachée au lambeau et totalement recouverte. Enfin le lambeau est tracté coronairement grâce à des sutures suspendues à des composites collés au niveau des points de contact interproximaux.

  

Les résultats positifs obtenus avec la technique du TACM sont en rapport avec :

 

• la libération du lambeau tunnélisé au-delà de la LMG et la libération des papilles de l’os sous jacent ;

• le recouvrement complet du greffon qui favorise la vascularisation ;

• la bonne stabilisation coronaire par les sutures suspendues autour des points de contact.

 

Le concept de la membrane Mucograft® de Geistlich est celui d’une membrane à deux couches : la couche superficielle, la plus mince, a une structure qui vise à protéger la cicatrisation à ciel ouvert, de l’infection en particulier. La couche sous-jacente est une structure spongieuse de collagène non réticulé et non modifié qui est destinée à faciliter la prolifération cellulaire des tissus mous et à stabiliser le caillot sanguin. Elle sert de matrice à la cicatrisation.

 

L’étude préliminaire à six mois sur le traitement des récessions multiples de classe I et II compare la cicatrisation du TACM associé au Mucograft® avec celle du TACM associé à la GTC dans le traitement des récessions multiples. Le protocole est le suivant : sur le même patient, le « côté contrôle », tiré au sort, est traité par TACM et GTC. À l’inverse, le « côté test » est traité par TACM et Mucograft® (étude randomisée contrôlée). L’absence de perte osseuse intercalaire est vérifiée sur un bilan long cône. Un charting des récessions initiales est effectué. Seul un surfaçage radiculaire est mené, sans aucun traitement chimique des racines dénudées.

 

À un mois, trois mois et six mois, il n’est pas enregistré de différence significative entre le côté test et le côté contrôle. En revanche, si l’on considère les recouvrements à 100 %, à 1 mois et à trois mois, il existe une différence en faveur du GTC. Toutefois, un certain « dynamisme » est constaté du côté Mucograft® à six mois, tendance qui se maintient à un an, ce qui aboutit à des résultats ne présentant pas de différence significative.

 

Au final, une belle stabilité de la gencive marginale peut être obtenue, ce qui va dans le sens de la limitation de l’aggravation des récessions – l’un des objectifs de ce type de traitement. Dans les cas de biotypes fins, les résultats sont assez prévisibles. Soulignons cependant que, malgré les progrès réalisés dans le traitement des récessions multiples, tous les sites et tous les patients ne sont pas candidats à ce type de traitement.

 

 

  



Les points clefs :

 

1. Le lambeau tunnélisé est de pleine épaisseur.

 

2. La mise en place de la matrice se fait sous le lambeau à l’aide de sutures.

 

3. Il y a déplacement coronaire du complexe matrice-lambeau.

 

4. Il y a fixation du complexe matrice lambeau à l’aide de points suspendus autour des points de contact interproximaux comblés au composite.

 

5. Tous les sites et tous les patients ne sont pas candidats à ce type de traitement.

 

 


 

Légende des photographies :

 

Photo 1. Traitement de récessions multiples mandibulaires.

 

Photo 2. Vue clinique préopératoire.

 

Photo 3. Surfaçage radiculaire.

 

Photo 4. Préparation du tunnel.

 

Photo 5. Placement de la matrice sous le lambeau tunnélisé.

 

Photo 6. Sutures suspendues autour du point de contact.

 

Photo 7. Situation à 6 mois.

 

Photo 8. La matrice Mucograft® présente deux structures : une structure compacte protectrice contre les infections et autorisant l’utilisation de la matrice à ciel ouvert, et une structure épaisse de collagène spongieux propice à la prolifération cellulaire.