Décrire les lésions parodontales, un sport de combat ? par Jean-François Michel

Décrire les lésions parodontales, un sport de combat ? par Jean-François Michel

Publié le lundi 25 septembre 2023

Dr Jean-François Michel

 


Le Mag / SOP


« Décrire les lésions parodontales,
un sport de combat ? »



Il faut bien l’admettre, l’implantologie, par son omniprésence, a relégué pendant des années la parodontologie au grenier poussiéreux des disciplines obsolètes en voie de remplacement. Comme si, dans le bâtiment, on changeait les fondations par les murs. Comme si, pressés de planter nos clous dans les maxillaires, nous av ions oublié que le patient existe, et qu’avec Voltaire il nous crie : « Je perds une dent, je meurs en détail. »


C’est la raison pour laquelle certains patients nous demandent encore de soigner leurs gencives et de conserver leurs dents. Quelle drôle d’idée, si peu raccord avec le marché ! En réalité, tout va plutôt dans le sens de la facilité : beaucoup de patients pensent que remplacer les dents par des implants va les dispenser d’une hygiène contraignante, éviter des douleurs, bref, « résoudre le problème » en remplaçant le sujet (la dent) par l’objet (l’implant). Comme si les choses étaient si simples…


La science universitaire ne fait pas mieux. Quand on regarde de près la nouvelle classification des maladies parodontales, on ne peut que regretter l’absence de la biologie et déplorer la description mécaniste et géographique des lésions.


Il n’est pas illégitime que la séméiologie soit descriptive. Mais il est regrettable qu’elle se limite à déterminer la sévérité d’une parodontite par le nombre de dents manquantes du stade I à IV, alors qu’un stade I qui se transforme en stade IV en quelques mois est une parodontite à évolution rapide. Doit-on sciemment ignorer le profil bactérien et la réponse immunitaire ?


Mais non, nous répondra-t-on : « Le grade est déterminé par le taux de progression ». Nous voilà sauvés ! « Vous êtes grade B, c’est moins que grade C, où la perte osseuse est supérieure à celle attendue compte tenu du biofilm ».


Du biofilm quantitatif ? Qualitatif ? Rien à voir, circulez ! Ce sont des spécialistes qui vous le disent, croyez et vous serez sauvés !
Non, décidément, ces descriptions de géographes des lésions parodontales ne sont pas le reflet de la réalité clinique. Elles ressemblent aux vieux meubles à tiroirs du muséum d’Histoire naturelle, dans lesquels l’entomologiste classe les insectes par taille et par couleur en espérant que l’on donne son nom à l’un d’entre eux. Tout est bon pour entrer dans l’Histoire… Mais cette classification-là ne classe pas grand-chose et sera vite remplacée. Le grand perdant, pour le moment, est le patient.
À suivre.


Jean-François Michel
   

 Source : article publié page 11 dans le Journal de la SOP n°5 2023 

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