Publié le lundi 11 septembre 2023
Les petits bonheurs, les doutes et parfois les affres d’un exercice
au quotidien en pratique généraliste vus par Valérie Travert, omnipraticienne.
« Professionnel ». Tel est l’état d’esprit que j’adopte pour survivre à l’effervescence et parfois à l’émotion que l’on peut ressentir dans le cadre de notre exercice.
Cela ne signifie pas exercer comme un robot. Donner une place centrale à notre humanité et à celle de nos patients, oui.
Se laisser engloutir par ses affects, non.
Par exemple, je trouve très sain de ressentir une forte empathie envers un patient en échec thérapeutique.
Mais ensuite, c’est au professionnel médical de prendre le relais. Voilà.
Ça, c’est la théorie.
En pratique, il arrive que le cas d’un patient nous ébranle au point de devenir émotionnellement éprouvant.
C’est ce qui m’arrive ici avec cette nouvelle patiente dont la panoramique montre des implants posés à l’arcade supérieure supportant une prothèse.
La majorité des implants présentent une péri implantite et ne sont pas conservables…
J’ai certes quelques décennies de pratique au compteur, mais je l’avoue, là, je suis sous le choc.
La patiente est âgée de 55 ans.
Depuis sa vie de jeune adulte, elle a consulté pour des soins conservateurs, puis des endos avec couronnes et bridges, puis des extractions, puis les premiers implants, puis l’extraction des autres dents pour de nouveaux implants.
Un chemin de croix thérapeutique parfois chargé d’espoir, onéreux, mais suivi d’échecs et de douleurs.
Elle est en pleurs sur mon fauteuil. Je n’en mène pas large.
Elle demande l’extraction de tous ses implants.
Elle souhaite qu’on lui pose une prothèse amovible.
Je suis ébranlée par son désespoir, au point que mon métier me quitte.
Je suis émue par une femme en perdition dans ses relations amoureuses, affectives, sociales et professionnelles.
Je sens que je me dois de l’aider à retrouver confiance et sérénité et ferai le maximum pour lui donner une nouvelle naissance.
par Valérie Travert, omnipraticienne
Chronique de fauteuil n°13 à lire en page 7 du Journal de la SOP, le JSOP
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