Quand un échec de thérapeutique parodontale cache une autre pathologie - Zoom Clinique n°9 par Ishaï-Yaacov Sitbon

Quand un échec de thérapeutique parodontale cache une autre pathologie - Zoom Clinique n°9 par Ishaï-Yaacov Sitbon

Publié le mardi 28 mars 2023


   ZOOM CLINIQUE N°9   

sous la direction éditoriale de Mathilde Jalladaud
 



Quand un échec de thérapeutique parodontale cache une autre pathologie



Cas clinique de Ishaï-Yaacov Sitbon,
exercice mix te libéral et hospitalier, orienté en pathologie et dermatologie buccale.
 

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Un échec même partiel en fin de traitement parodontal bien mené avec une bonne observance et participation du patient, doit amener à s’interroger sur les causes dudit échec pour chercher à les contrôler.

Figure 1

Néanmoins, devant certains signes cliniques particuliers, une nouvelle orientation diagnostique sera envisagée :
- Gingivorragies spontanées ou provoquées non corrélées à l’accumulation de plaque.
- Gène ou douleur à l’alimentation et au brossage.
- Aspect vernissé avec ou sans œdème gingival
- Présence de lésions muqueuses.

En consultation de dermatologie buccale, les situations parodontales ou gingivales atypiques cliniquement ou dans leur réponse aux traitements sont un des principaux motifs de consultation.

Figure 2



CAS CLINIQUE

Mme M. 60 ans, sans antécédents médicaux notables, ancienne fumeuse sevrée (2003) se présente en consultation de pathologie buccale, ainsi qu’en hospitalisation de jour, à l’hôpital Avicenne en mai 2021.

En 2018, elle rapportait : gingivorragies au bros- sage, halitose, et gencives gonflées parfois douloureuses. Son chirurgien-dentiste l’a alors adressée, devant sa symptomatologie douloureuse, à un parodontiste pour traitement de sa maladie parodontale.

Figure 3

En 2021, malgré une bonne observance théraeutique, un contrôle de plaque satisfaisant et un suivi régulier, la patiente soulagée de la disparition de l’œdème gingival et de l’halitose, se plaignait toujours de :

- Douleurs gingivales spontanées et provoquées au brossage et à l’alimentation.
- Sensation de « peau qui part dans la bouche ».
- Petites cloques à contenu liquidien.

Devant ce tableau, son parodontiste l’adressait pour exploration clinique de sa gingivite érosive linéaire persistante.

Figure 4


L’examen clinique endobuccal révélait :
- Un érythème gingival linéaire diffus, locale- ment érodé [Fig. 1-5].
- Des toits de bulles (aspect de « peau blanchâtre » surélevée et décollée en bordure d’érosion) [Fig. 1-4].
- Des érosions post-bulleuses [Fig. 3-5].
- Une bulle intacte [Fig. 5].
- Un signe de la pince positif sur plus dec0,5 mm [Fig. 6].

Figure 5


Cet examen stomatologique fut complété par un bilan ORL qui retrouvait un érythème du cavum et de la région aryténoïde, un examen ophtalmologique concluant à une conjonctivite fibrosante débutante, un bilan sanguin à la recherche d’anticorps circulants et une consultation dermatologique ne retrouvant aucune localisation cutanée.

Une biopsie gingivale pour analyse histologique et immunofluorescence directe (positive) a permis d’objectiver un décollement bulleux sous-épithélial, et un dépôt linéaire d’IgG et C3.

Figure 6

Ces examens ont permis de poser un diagnostic de Maladie Bulleuse Auto-Immune (MBAI) de type Pemphigoïde Cicatricielle avec atteinte Buc- cale, ORL, et ophtalmologique.

Un traitement par Disulone a été entrepris, et la symptomatologie buccale contrôlée par des bains de bouche corticoïdes.


CONCLUSION

Reconnaître les signes d’appel des MBAI, ou les situations cliniques atypiques, permet d’adresser les patients et d’intercepter des pathologies aux conséquences potentielles graves (allant de la cécité à l’engagement du pronostic vital, selon la MBAI) à un stade encore débutant, limitant les séquelles éventuelles.

 

par Ishaï-Yaacov Sitbon

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Légendes des figures :

Fig. 1 - Secteur antérieur inférieur avec : gencive érodée de 32 31 42 43 et toit de bulle en distal de 41.
Fig. 2 - Secteur latéral droit inférieur avec : Gencive érodée en vestibulaire de 45-46,
érythème diffus.
Fig. 3 - Secteur latéral gauche inférieur avec : Une érosion circulaire post-bulleuse à halo érythémateux en 34-35.
Fig. 4 - Secteur antérieur supérieur avec : un érythème linéaire diffus, un toit de bulle
visible sur la papille 12-13.
Fig. 5 - Secteur latéral droit supérieur avec : un toit de bulle en bord d’érosion (16) ; une bulle intacte en regard de 14
Fig. 6 - Illustration d’un signe de la pince positif sur plus de 0,5 mm en regard du toit de bulle de la papille 12-13.

 



Bibliographie :

→ (1)  Chan LS, Ahmed AR, Anhalt GJ, Bernauer W, et al. The first international consensus on mucous membrane pemphigoid: definition, diagnostic criteria, pathogenic factors, medical treatment, and prognostic indicators. Arch Dermatol. 2002 Mar;138(3):370-9

→ (2)  Marinovic B, Caux F, Prost C, et Al. Definitions and outcome measures for mucous membrane pemphigoid: recommendations of an international panel of experts. J Am Acad Derma- tol. 2015 Jan;72(1):168-74 } *

→ (3)  Alexandre M, Brette MD, Pascal F, et Al. A prospective study of upper aerodigestive tract manifestations of mucous membrane pemphigoid. Medicine (Baltimore). 2006 Jul;85(4):239-252.

 


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Quand un échec de thérapeutique parodontale cache une autre pathologie - JSOP 3 2023   
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Quand un échec de thérapeutique parodontale cache une autre pathologie - JSOP 3 2023   

Source : pages 8 et 9 Journal de la SOP n°3 mars-avril 2023   
 

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