« Les mutins de la charlotte » Nouvelle Chronique de Fauteuil par Valérie Travert

« Les mutins de la charlotte »  Nouvelle Chronique de Fauteuil par Valérie Travert

Publié le jeudi 12 janvier 2023

Valérie Travert


 





   CHRONIQUE DE FAUTEUIL  


Les mutins de la charlotte


Les petits bonheurs, les doutes et parfois les affres d’un exercice
au quotidien en pratique généraliste vus par Valérie Travert, omnipraticienne.

 

Depuis le Covid, comme tous les praticiens, j’ai ajouté à ma panoplie classique (masque, gants, etc.) une surblouse et un calot. C’est devenu tellement évident que je ne le remarque plus. Il n’en va pas de même pour les patients.

Un sociologue (ou un psychologue) se réjouirait d’avoir à sa portée, dans le cabinet dentaire, une cohorte de patients ne réagissant pas tous de la même manière à la gentille et délicate invitation de mon assistante à enfiler des surchaussures et à se coiffer d’une charlotte.

Certains patients refusent tout net, pestant contre ce qu’ils estiment être un excès de précaution. Surtout pour les charlottes. C’est la charlotte, le problème. Les récalcitrants de la charlotte expliquent souvent que leurs cheveux ou leur brushing vont s’aplatir, et qu’il n’est donc pas question de se coiffer de cet accessoire.

Grâce aux encouragements chaleureux de mon assistante, ils finissent tout de même par l’accepter. Certains continuent à maugréer. Ils disent ne ressembler à rien, ils se sentent ridicules, etc. Je leur explique qu’ils sont là pour des soins, pas pour un concours de beauté.

À partir de là, il reste une petite minorité de patients qui, de toute évidence, se fait vraiment violence. Au point que, au moment où je relève le fauteuil, ils arrachent immédiatement la coiffe de leur tête, comme si elle les empêchait de respirer. Ou, plus probablement, comme si elle leur faisait perdre leur dignité ou leur identité.

Avec le temps, j’ai fini par observer que les plus réticents cumulent trois critères : ce sont souvent de belles femmes ou de beaux hommes, ils exercent des postes de pouvoir dans leur vie professionnelle, et enfin, ils sont équipés d’une très haute estime d’eux- mêmes.

Ce rapport très particulier à la charlotte est devenu, à mon corps défendant, un petit raccourci pour identifier ce trait de personnalité.

 

par Valérie Travert, omnipraticienne


Chronique de fauteuil à lire en page 7 du Journal de la SOP :
JSOP n°1 janvier 2023 / « Les mutins de la charlotte » par Valérie Travert   


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