Aborder sereinement les traumatismes alvéolo-dentaires

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Aborder sereinement les traumatismes alvéolo-dentaires

 

par Michèle Muller-Bolla *

 

 

 

Suite à un traumatisme, le premier échange avec le patient se fait souvent à l’occasion d’un appel téléphonique qui va permettre d’évaluer l’urgence bucco-dentaire après élimination du risque de traumatisme crânien (perte de connaissance, vomissements…).1  - Éléments à prendre en considération dans le cas d’une dent partiellement ou totalement déplacée pour orienter le diagnostic (www.dentaltramaguide.org).

 

En cas d’expulsion dentaire ou d’exposition pulpaire, il est en effet capital que le patient consulte dans l’heure suivant le traumatisme. Une fois arrivé au cabinet dentaire, sa prise en charge doit obéir à une certaine chronologie à l’occasion du questionnaire (historique du traumatisme et anamnèse) puis de l’examen clinique.

Le premier va permettre de définir la zone à investiguer et les précautions particulières à éventuellement prendre (antibiothérapie, rappel antitétanique).

À l’examen exo-buccal incluant inspection visuelle, palpation des tissus mous et des rebords osseux, succède un examen endo-buccal minutieux intéressant l’occlusion, les tissus muqueux, la ou les dents impliquées ainsi que leur parodonte. Cet examen visuel est complété par des tests cliniques de mobilité, percussion et sensibilité pulpaire qui vont permettre une première approche diagnostique (schéma 1) confirmée ou infirmée par les examens radiographiques variables en fonction des situations cliniques.2 - Solutions thérapeutiques à adopter en fonction de la maturité et de l’amplitude du déplacement d’une dent permanente intruse.

 

L’ensemble de ces étapes diagnostiques permettent également de déterminer le pronostic de la dent, dépendant du stade de maturité radiculaire, de la réponse aux tests de sensibilité pulpaire du jour de la première consultation, de l’amplitude du déplacement et/ou de la taille de l’exposition pulpaire, c’est-à-dire des traumatismes éventuellement associés, et du temps écoulé avant la prise en charge thérapeutique. Par exemple, dans le cas d’une fracture amélo-dentinaire traitée par restauration ou collage du fragment coronaire fracturé, le risque de nécrose augmente significativement si la prise en charge permettant une oblitération des tubuli dentinaires ne se fait pas dans les trois jours.

3 - Prise en charge thérapeutique des dents permanentes immatures et matures expulsées en fonction du milieu de conservation de celles-ci et du délai de prise en charge. Les milieux de conservation adéquats sont par ordre décroissant de qualité la SOS Dentobox, le lait écrémé, le sérum physiologique et la salive. 

En cas d’exposition pulpaire, ce délai doit passer à une heure afin d’effectuer un coiffage direct ou une pulpotomie partielle à l’hydroxyde de calcium ou au MTA (ou Biodentine) le plus rapidement possible pour préserver la vitalité pulpaire de la dent fracturée.

 

Dans le cas des intrusions, c’est le stade de maturité radiculaire et l’amplitude du déplacement qui constituent les facteurs pronostiques le plus importants à l’origine du choix de la meilleure des trois solutions thérapeutiques envisageables, la surveillance de l’éruption spontannée (schéma 2).

 4 - Durée de contention en fonction du type de traumatismes intéressant les dents permanentes. La contention classique de 2 semaines est prolongée de 2 semaines en cas de fracture osseuse. Elle peut durer 4 mois en cas de fracture radiculaire dans le tiers coronaire responsable d’une importante mobilité du fragment coronaire.

Enfin, ces éléments pronostiques sont à compléter par le milieu de conservation adéquat (lait écrémé) ou non (eau du robinet) de la dent expulsée (schéma 3). D’une façon générale, la vitalité pulpaire sera évaluée à 6-8 semaines, 6 mois et 1 an par un double examen clinique et radiographique mais d’autres visites peuvent être envisagées en amont du fait de la contention à retirer (schéma 4) ou de la surveillance de l’éruption spontanée d’une dent intruse.

  

 

* L’auteur souhaite associer le Dr Chantal Naulin-Ifi à cette présentation réalisée avec sa collaboration à l’occasion de la journée traumatologie de la SOP.

 


   

Le cas particulier des dents temporaires

  

Dans le cas des traumatismes des tissus parodontaux, la première question que se pose le praticien est la conservation de la dent temporaire traumatisée.5 - Luxation des 51 et 61 versées en  direction palatine à extraire du fait de la sévérité du déplacement.

Pour optimiser le pronostic de la dent successionnelle, elle doit être extraite si elle est au stade de stabilité ou de résorption (après l’âge de 3 ans pour une incisive supérieure), si son apex se situe à proximité du germe (rapport mis en évidence sur un mordu occlusal ou un cliché latéral) et/ou si le déplacement sévère de la dent temporaire perturbe l’occlusion (photo 5). Si le déplacement est limité à 2-3 mm, la dent est remise en place par pression digitale douce.

En revanche, s’il n’y a pas d’interférence occlusale, il y aura abstention thérapeutique.

À l’exception du collage du fragment dentaire, les prises en charge des fractures coronaires sont comparables à celles des dents permanentes.6 -  Enfant de 18 mois affecté par la carie précoce de la petite enfance ayant  consulté immédiatement après sa chute. La 51 (facture amélo-dentinaire avec exposition pulpaire) a dû être extraite du fait des difficultés de restauration alors que la 61 a été reconstituée après élimination du fragment coronaire (fracture corono-radiculaire sans exposition pulpaire).

Cependant, l’extraction peut également être envisagée (absence de possibilité de restauration ou de coopération de l’enfant, stade de résorption, délai de prise en charge).

La conservation du fragment coronaire suite à une fracture radiculaire peut être envisagée s’il n’est pas mobile et/ou faiblement déplacé. De même, il ne doit pas y avoir de communication entre le trait de fracture et la cavité orale. C’est un des deux cas où une contention peut être réalisée pendant quatre semaines ; l’autre correspondant à la situation de fracture alvéolaire.

Dans le cas contraire, le fragment coronaire est extrait et, la résorption du fragment radiculaire surveillée dans le temps. 

  

 


 

Légendes des 6 schémas / photographies :

1  - Éléments à prendre en considération dans le cas d’une dent partiellement ou totalement déplacée pour orienter le diagnostic (www.dentaltramaguide.org).

2 - Solutions thérapeutiques à adopter en fonction de la maturité et de l’amplitude du déplacement d’une dent permanente intruse.

3 - Prise en charge thérapeutique des dents permanentes immatures et matures expulsées en fonction du milieu de conservation de celles-ci et du délai de prise en charge. Les milieux de conservation adéquats sont par ordre décroissant de qualité la SOS Dentobox, le lait écrémé, le sérum physiologique et la salive.

4 - Durée de contention en fonction du type de traumatismes intéressant les dents permanentes. La contention classique de 2 semaines est prolongée de 2 semaines en cas de fracture osseuse. Elle peut durer 4 mois en cas de fracture radiculaire dans le tiers coronaire responsable d’une importante mobilité du fragment coronaire.

5 - Luxation des 51 et 61 versées en  direction palatine à extraire du fait de la sévérité du déplacement.

6 -  Enfant de 18 mois affecté par la carie précoce de la petite enfance ayant  consulté immédiatement après sa chute. La 51 (facture amélo-dentinaire avec exposition pulpaire) a dû être extraite du fait des difficultés de restauration alors que la 61 a été reconstituée après élimination du fragment coronaire (fracture corono-radiculaire sans exposition pulpaire).