L'intervention de Stéphane Cazier et Christian Moussally

 

Christian MoussalyL’intervention de Stéphane Cazier et Christian MoussallyStéphane Cazier

 

 

 

 

Les derniers retardataires ont progressivement pris place dans la salle, et c’est devant un auditoire parfaitement attentif que l’on entre dans le vif du sujet avec l’arrivée sur l’estrade de Christian Moussally, pour les commentaires, et l’apparition à l’écran de Stéphane Cazier, blouse blanche, gants bleus, dans une magnifique ambiance de salle d’intervention « bleu aquarium ».

 

1 . Présentation du cas.

Stéphane Cazier nous présente son patient, Benjamin, un confrère d’une quarantaine d’années, dont la 16 a subi un traitement endodontique suivi d’une reconstitution coronoradiculaire adhésive. Puis il disparaît de l’écran pour laisser place aux photos de Christian Moussally, qui parle sur un fond sonore meublé par l’aspiration chirurgicale et la turbine, déjà lancés : « Voyez, ce délabrement coronaire important nécessite une couronne plutôt qu’un onlay ! »

 

Effectivement, la dent présente une cuspide mésio-vestibulaire en sousocclusion, sa face vestibulaire est dyschromiée, mais la face palatine est intacte. « En palatin, la ligne de finition sera nettement supragingivale. » Commentaire chuchoté à proximité : « Tu verras que ce sera juxta vu la hauteur de la dent. »

 

2. Vue occlusale de la préparation terminée.

Le conférencier poursuit : « La restauration céramique collée sera monolithique et esthétique. Notre choix s’est porté sur une vitrocéramique renforcée au disilicate de lithium (e.max® CAD), usinée à partir d’un lingotin, dont la couleur bleu violacé est liée à l’état précristallisé de la céramique. »

 

Problème : « Mais pourquoi n’a-t-on pas encore l’image ? », interroge un praticien. Déjà Bertrand Tervil, membre du groupe de travail qui a préparé la Journée, est parti en régie pour y remédier. Sa voisine renchérit gentiment : « Il est vrai que le thème de la Journée est l’empreinte optique, mais puisque la préparation est faite dans la même séance, il faut montrer l’ensemble de celle-ci ! On est là pour ça ! »

 

3. Résultat de la numérisation (Lyra®).

Christian Moussally a ainsi le temps de définir la chronologie de la séance, les principes de préparation (épaulement à angle interne arrondi de 0,8 mm à 1 mm de large, réduction homothétique de 1,5 mm au niveau de la face occlusale, angles de transition arrondis) et le matériel utilisé avant que les images de la salle d’intervention ne reviennent à l’écran et que, déjà, Stéphane Cazier procède aux finitions de la préparation à l’aide d’instruments soniques.

 

« On voit bien le cordonnet Ultrapack n° 1 et la situation supragingivale de la ligne de finition en palatin, mais en vestibulaire ? interroge Christian Moussally.

En vestibulaire, elle sera légèrement supra », indique Stéphane Cazier.

Puis, c’est au tour de Bernard Schweitz, au vu d’un léger saignement mésial là où la préparation n’est pas achevée, de s’interroger : « Si la limite doit être sous-gingivale, est-ce encore une indication d’empreinte optique ? »

 

4. Résultat de la numérisation (Cerec).

À l’écran, il y a objectivement une difficulté en mésial car une fusée de composite de reconstitution est allée se loger dans la concavité radiculaire. Dans cette zone où les possibilités de réaliser un congé s’amenuisent en même temps que diminue le diamètre radiculaire.

« Non, répond Stéphane Cazier, il suffit que j’obtienne l’hémostase, mais j’ai oublié d’apporter un hémostatique… Ou alors, il me faudrait un gros coin de bois. »

 

C’est l’occasion pour Christian Moussally, pendant que Stéphane Cazier gère le saignement mésial, de reprendre l’aspect théorique. « Le mouvement oscillatoire des inserts soniques est atraumatique pour le parodonte, et l’utilisation de Fender Wedge permet de protéger les faces proximales des dents voisines ! ».

 

Puis il définit les quatre maillons de la chaîne numérique de la CFAO :

5. Résultat de la numérisation des antagonistes (Cerec).

1. Acquisition des valeurs numériques.

2. Conception assistée par ordinateur.

3. Fabrication assistée par ordinateur.

4. Restauration (du numérique au réel).

 

6. Détermination des limites de la préparation (Cerec).

Il rappelle qu’en CFAO directe toutes les étapes sont réalisées au cabinet, et le plus souvent en une seule séance.

« Différents systèmes permettent la CFAO directe : Cerec (Sirona), Lyra (GACD), CS Solutions (CareStream), Planmeca. ».

 

Dix minutes se sont écoulées et, à présent, l’épaulement à angle interne arrondi a été reporté plus apicalement. La ligne de finition est nette. Il reste un petit saignement.

« Avec quelle caméra vas-tu faire la première empreinte ? interroge Bernard Schweitz de la tribune.

– Avec la caméra Trios ! répond l’opérateur qui joint le geste à la parole. Vous voyez que c’est un matériel assez encombrant. »

 

7. Détermination des limites de la préparation (Lyra®).

De la salle Christian Moussally précise : « La caméra Trios (3Shape) exploite l’imagerie confocale parallèle. Il y a acquisition d’un nuage de points en flux continu, puis concaténation des données. Ces nuages de points sont traités mathématiquement après nettoyage et élimination des points aberrants, les points sont reliés trois par trois entre eux de façon à créer un volume : l’empreinte numérique. ».

La justesse et la fidélité de l’empreinte optique donne son exactitude.

 

Nous passons à la seconde empreinte, cette fois-ci avec la caméra Omnicam (Cerec) qui « fonctionne selon un principe de triangulation. Il faut une source de lumière laser, deux diaphragmes distants l’un de l’autre et un récepteur électronique photosensible. La lumière émise est réfléchie sur l’objet dans toutes les directions, et certains faisceaux passent les diaphragmes et retrouvent le capteur photosensible. Plus la distance augmente, plus l’angle de réflexion devient aigu. On obtient ainsi la notion de profondeur. Dans le cas de surface métallique ou rendue brillante par du sang ou de la salive, il y a un effet poli miroir, et la réflexion de la lumière se fait dans une seule direction. Si ce faisceau lumineux ne passe pas par les diaphragmes, l’enregistrement sur le récepteur photosensible est impossible. D’où le poudrage avant l’empreinte optique ».

 

8. Proposition logicielle de couronne en fonction de l’occlusion (Cerec).

Il est précisé que la qualité de l’empreinte optique est liée au nombre de points enregistrés. Un signal visuel permet d’indiquer le manque de précision. Cependant, tous les systèmes se valent en termes de précision, seule l’ergonomie diverge.

« Ce sont des gestes qui s’apparentent plus à une échographie qu’à une prise d’empreinte », remarque Bernard Schweitz, pendant que Stéphane Cazier, aides optiques relevées, a le regard fixé sur le moniteur où se construit peu à peu l’image.

Christian Moussally : « Par plaquage de texture, on obtient une image en couleurs. Les nuances de teinte facilitent le repérage des limites juxtagingivales comparativement aux caméras monochromes. La définition des limites sur l’empreinte numérique est faite par un logiciel qui utilise un algorithme de reconnaissance d’arête, mais là encore on peut apporter ses modifications. »

 

Alors que l’enregistrement de l’occlusion vient d’être réalisé en intercuspidie maximale survient une question de la salle :

9. Proposition de couronne en fonction des mêmes critères (Lyra®).

« Peut-on faire un enregistrement de l’enveloppe fonctionnelle ?

– Non, pas encore. »

L’étape suivante est la CAO ou modélisation de la restauration prothétique.

« Le logiciel de CAO procède à un calcul de la restauration par une analyse de la forme des dents adjacentes et antagonistes. On parle de référence biogénérique, sorte de “copier-coller”. »

 

Là, Stéphane Cazier lève les mains pour montrer que la restauration prothétique est faite par le seul logiciel. Maintenant, il modifie la forme proposée par le logiciel, regonfle les points de contact et la face vestibulaire.

10. Mise en place du bloc dans l’unité d’usinage (Cerec).

« La fabrication des deux couronnes va être menée pendant la pause de façon simultanée. Comme vous l’entendez, ces machines sont assez bruyantes, mais vous pouvez, comme je l’ai fait dans mon cabinet, les placer dans une enceinte close pour en atténuer le bruit. Cela a de plus l’avantage de valoriser ce matériel ainsi placé dans une sorte de vitrine aux yeux de nos patients ! », expose Christian Moussally de la tribune. Cependant, la mise en place du bloc de céramique dans l’unité d’usinage, avec son serrage à l’aide d’un tournevis pour le système Cerec, nous fait penser que nous passons sans transition d’un univers clinique à celui du rayon bricolage d’un grand magasin !

 

La pause est bienvenue. Elle va permettre de faire le tour des exposants grâce auxquels de telles Journées ne pourraient pas avoir lieu.

De retour dans la salle, nous retrouvons Stéphane Cazier dans son ambiance bleutée pour nous entendre expliquer qu’avant maquillage cet aspect d’opaline de la céramique se dénomme le stade « blue block ».

 

11. Mise en place du bloc de céramique dans l’unité d’usinage (Lyra®).

À se demander si le cadre de travail dans lequel évolue Stéphane depuis le début de la matinée ne relève pas d’un choix délibéré en rapport avec l’identité graphique propre à l’e.max® CAD !

Il essaie la couronne du système Lyra en premier, vérifie les points de contact qui sont un peu forts, les règle, mais un défaut d’adaptation persiste à l’angle MV. Un brouhaha de protestation s’élève dans la salle quand Stéphane Cazier retouche l’intrados de la couronne de quelques coups de fraise décidés !

 

« Non, non, ne vous offusquez pas ! s’exclame Christian Moussally de la tribune : il a simplement retouché la zone du sillon occlusal car la fraise, qui mesure 1 mm de diamètre, ne peut pas reproduire des angles vifs, et le logiciel décide de ne pas reproduire l’angle ! »

12. Maquillage de la céramique.

À petits coups de pinceau précis, l’opérateur poursuit : « Je maquille à l’aide de stains. »

Mais déjà, Bernard Schweitz l’interrompt :

« Ça prend du temps quand même ! Bon là, tu vas passer la couronne au four pour la cristallisation et, pendant la cuisson, nous allons demander à Hélène Fron Chabouis de venir nous parler du choix des matériaux en CFAO. À toi Hélène pour 15 minutes ! ».

 

 

Fin de la permière partie de leur intervention. 

> Voir maintenant la présentation de Héléne Fron Chabouis : cliquez-ici

 

 


  

Tableau comparatif 


Reprise et fin de leur intervention. 

  

 

13. Sablage de la préparation.

« Avant l’assemblage, explique Stéphane Cazier, nous allons traiter l’intrados avec le Ceramic IPS Kit et silaniser avec du Monobond Plus. Nous allons aussi augmenter la rugosité de surface du moignon avec le système Rondoflex de Kavo. »

 

Avec ce cadrage serré, c’est le Grand Bleu tant le rinçage est abondant sur fond de digue… bleue ! « La digue est posée sur une seule dent pour protéger les dents voisines, poursuit Stéphane Cazier.

– Cela ne gêne pas l’insertion et l’établissement de bons points de contact interproximaux ?14. Enduction de l’intrados de la couronne.

interroge Alexis Lopater de la table d’animation.

 

– Non, pas du tout. Cette digue Dermadam®, fabriquée par Ultradent et distribuée par Bisico, est très extensible et, une fois comprimée au niveau des points de contact proximaux, elle fait quelques microns d’épaisseur », explique Christian Moussally.15. Passage des strips interdentaires.

 

Stéphane Cazier passe à l’assemblage à l’aide de Multilink® Automix, l’insolation, le retrait des excès polymérisés. Le patient sursaute au passage énergique du fil dentaire au niveau des points de contact interproximaux. « C’est dur le direct, n’est ce pas ? », interroge Bernard Schweitz, alors que le regard du patient devient de plus en plus noir…

 

Le rythme s’est accéléré et les gestes sont devenus plus vifs pour le polissage à la fraise turbine des fusées de colle. Les brossettes suivent. « Notre patient fatigue un peu ! se soucie Stéphane Cazier. On va pouvoir le remercier. On le comprend totalement ! »

Alors que le public applaudit la belle matinée que nous ont offerte les deux conférenciers, Bernard, un habitué des séances de la SOP, commente au vu des nombreuses retouches de finition : « On est quand même surpris de voir le contraste entre la haute technologie mise en œuvre et le trivial des retouches de finition ! » .16. Vue finale en bouche après maquillage et scellement.

 

 

 


Légendes des illustrations :

1 . Présentation du cas.

2. Vue occlusale de la préparation terminée.

3. Résultat de la numérisation (Lyra®).

4. Résultat de la numérisation (Cerec).

5. Résultat de la numérisation des antagonistes (Cerec).

6. Détermination des limites de la préparation (Cerec).

7. Détermination des limites de la préparation (Lyra®).

8. Proposition logicielle de couronne en fonction de l’occlusion (Cerec).

9. Proposition de couronne en fonction des mêmes critères (Lyra®).

10. Mise en place du bloc dans l’unité d’usinage (Cerec).

11. Mise en place du bloc de céramique dans l’unité d’usinage (Lyra®).

12. Maquillage de la céramique.

13. Sablage de la préparation.

14. Enduction de l’intrados de la couronne.

15. Passage des strips interdentaires.

16. Vue finale en bouche après maquillage et scellement.