Traitement d'une élongation coronaire

Quatre actes de chirurgie parodontale en direct :

Traitement d’une élongation coronaire

 

L’intervention chirurgicale de Jacques Malet

 

Bernard Schweitz annonce que l’intervention sera réalisée sur une première molaire mandibulaire droite (46). Il s’agira d’effectuer une élongation coronaire à laquelle sera associée une greffe de conjonctif enfoui. L’objectif de l’élongation coronaire est de créer un espace biologique suffisant.

Quant à l’objectif de la greffe, il consiste à obtenir une bonne résistance du parodonte en augmentant l’épaisseur de muqueuse kératinisée. Une fois la couronne provisoire déposée, on constate que la dent est traitée et restaurée par un composite disto-occlusal.

« Vous noterez des tissus très fins en vestibulaire et une importante inflammation en rapport avec une limite de préparation très sous-gingivale en distal » commente Bernard Schweitz.

Jacques Malet poursuit son intervention, en plaçant une sonde parodontale au niveau de la furcation.

« La furcation n’est pas atteinte, constate-t-il en proposant une vue linguale dans un miroir photographique. La hauteur coronaire est assez faible et il y a un excès de muqueuse kératinisée. Une gingivectomie à biseau interne en lingual est donc tout indiquée pour gagner de la hauteur. »

Jacques Malet commence son intervention en vestibulaire par une incision intrasulculaire. Il désépaissit la papille distale et réalise un lambeau d’épaisseur totale. En lingual, la gingivectomie à biseau interne réalise un décolletage de 1,5 mm en lingual de la 46 et l’incision reste intrasulculaire au niveau de 47 et 45. Le décolleur de Molt écarte le lambeau de la collerette qui est supprimé à l’aide d’une curette de H6/H7.

« En distal, j’élimine le tissu de granulation mais les limites sont insuffisamment dégagées.

– Et en lingual, l’os semble épais ?

interroge Bernard Schweitz.

– Oui, il va falloir le désépaissir.

Pour cette ostéoplastie, on pourrait utiliser des instruments rotatifs classiques, mais je préfère l’insert piézoélectrique qui permet de travailler dans différents sens, donne un meilleur contrôle du geste et un meilleur accès visuel sans être gêné par la tête d’un contre-angle. J’utilise un insert en forme de boule de 2,5 mm de diamètre. Le but est d’obtenir une surface lisse sans aspérités et sans angles. »

Soudain, l’image se floute… du fait de l’aspersion d’eau générée par l’ostéotomie. Mais promptement, l’opérateur enduit le miroir photographique de Mercryl afin de remédier à cet inconvénient qui l’entrave dans son travail autant qu’il perturbe les observateurs attentifs de la salle. 

 


 

Prélèvement du greffon palatin

 

À présent, l’accès visuel est parfait et Bernard Schweitz constate : « Tu as une architecture inversée du septum en distal. »

Jacques Malet explique : « On a un bec vestibulaire à angle droit qu’il faut supprimer. Je ne peux pas aller plus loin en distal, mais on obtient une architecture à plat qui est acceptable au niveau molaire. Avant d’ajouter :

– Là, je prolonge l’ostéoplastie en vestibulaire car il n’y a que 1 mm de hauteur de dent entre la ligne de finition et le rebord osseux, mais je suis limité par la furcation que je dois respecter. » Enfin, le reste du système d’attache est éliminé des racines de 46 et 47 avec un 204S.

Bernard Schweitz : « Tu vas pouvoir passer à la phase suivante et prélever le greffon palatin. On suppose que tu as fait une anesthésie au palais ? »

La réponse – « Tu fais bien de me le rappeler ! » – déclenche les rires de l’assistance. L’opérateur réalise un prélèvement en trappe en avant de l’émergence du foramen grand palatin. Les deux incisions, l’une perpendiculaire et l’autre parallèle à l’axe des racines, sont réalisées dans le même trait à 3 mm des collets. C’est un prélèvement d’épaisseur totale qui sera placé sur le site receveur périoste contre l’os.

« Je place le greffon dans une compresse humide et non pas dans du sérum physiologique dont la pression osmotique est trop importante. »

La tribune commente : « Jacques va maintenant suturer le site de prélèvement. Il est vital pour la survie du lambeau qu’il soit plaqué au contact osseux. D’ailleurs, quand la muqueuse est très épaisse, le prélèvement se fait en épaisseur partielle. »

Passant aux sutures, Jacques Malet souligne que, afin de ne pas déchirer le volet palatin très aminci près du tracé d’incision, il faut que les sutures soient très à distance. Il le met en tension en serrant ses noeuds, puis obtient un bon placage et l’hémostase en comprimant.

 


 

Suturer d’apical en coronaire

 

L’opérateur passe alors au traitement du greffon qu’il désépaissit avec une lame 11 aux dépens des tissus adipeux superficiels afin d’obtenir une épaisseur régulière de l’ordre de 1 à 1,5 mm. Il suture la partie mésiale du greffon (au Vicryl 6.0 et à l’aide d’une aiguille de 13 mm) qui doit être positionné au collet. Le fil passe dans le lambeau, puis l’opérateur réalise un point de matelassier vertical en entrant apicalement pour ressortir en coronaire. La même opération est reproduite en distal.

À une question de Bernard Schweitz sur la position du greffon, Jacques Malet de préciser : « Je préfère que le greffon soit trop coronaire plutôt que trop apical. Vous voyez, en plaçant le noeud de la suture de matelassier en vestibulaire, j’obtiens une apicalisation spontanée du lambeau en distovestibulaire. »

En répondant à une question de Sofia Aroca concernant l’importance de suturer d’apical en coronaire et non l’inverse, Jacques Malet fait allusion à leur formation commune. L’occasion pour Meyer Fitoussi de rendre hommage à leur maître, Daniel Étienne.

« En lingual, il y a une petite exposition osseuse que je protège avec un pansement parodontal. » Pour un résultat optimal, il est particulièrement important d’obtenir la stabilisation du greffon. Enfin, il faut prévenir le patient que le risque de sensibilité au niveau de la 47 est augmenté à la suite de cette intervention.

 

 


  

Légendes  des 12 photographies :

 

1. 11 h 02 : Présentation du cas clinique.

 

2. 11 h 07 : Incision intrasulculaire.

 

3. 11 h 11 : Décollement en épaisseur totale.

 

4. 11 h 16 : Ostéoplastie vestibulaire.

 

5. 11 h 23 : Ostéoplastie angle DV.

 

6. 11 h 29 : Incision.

 

7. 11 h 30 : Décollement.

 

8. 11 h 32 : Sutures sur le site de prélèvement.

 

9. 11 h 34 : Désépaississement du greffon.

 

10. 11 h 37 : Suture mésiale.

 

11. 11 h 42 : Suture du lambeau distal.

 

12. 11 h 46 : Mise en place de la couronne provisoire.