Welcome to the machine

Philippe Milcent (rédacteur en chef du JSOP)

Publié le mardi 01 mai 2007

Philippe Milcent

 

La révolution technologique a balayé toute une catégorie de professions dont les compétences et le savoir-faire étaient souvent admirables. Exit les typographes qui, avec une dextérité et une rapidité stupéfiantes, étalaient les caractères d'imprimerie pour composer des mots qui allaient former un journal ou un livre. Exit mon photographe de quartier, qui développait avec art mes pellicules professionnelles, parti pour cause de retraite anticipée. Qui sait ce que deviendront, demain, les magasins et leur vitrine avec l'avènement du commerce en ligne ?

Et nous dans tout cela ? Bien sûr, l'informatique est devenue une aide précieuse, mais aucun logiciel ne saurait poser un diagnostic, aucun appareil mettre en forme et obturer un système canalaire complexe, prendre une empreinte ou poser un implant.

Le danger ne tient pas à ce qu'une machine puisse nous remplacer, mais bien plutôt à ce que les rouages d'une vaste machine bureaucratique ne confisquent notre responsabilité de praticiens et n'entravent la liberté qui va avec. Notre vocation essentielle consiste, en fonction des données actuelles de la science, à prodiguer les meilleurs soins. Mais améliorer sa prestation nécessite d'améliorer le plateau technique y afférent et majore les coûts. Dans ce contexte, le meilleur service rendu au patient peut parfaitement aller dans le sens de l'intérêt particulier du praticien.

Mais qui peut entraver cet objectif qualitatif et décider, à notre place, de ce qui est bon pour nos patients et pour nous ? Peut-on, par le jeu compliqué des prélèvements et d´une redistribution technocratique, paperassière et humiliante, nous enfermer dans un système que nous ne contrôlons plus et dont nous devrions pourtant rester maîtres ?

Notre profession se doit d'être responsable, chaque praticien doit disposer d'un espace de liberté.

Pouvons-nous encore culpabiliser au motif que nous travaillons pour la santé et que nous avons une réputation de nantis ? Valons-nous moins, en termes de compétences et de service à la société, qu'un joueur de football ou qu'un animateur de télévision ?

Car, il y a une chose que nous ne devons jamais oublier : nous ne sommes pas seulement responsables, nous sommes irremplaçables.

  

  

par Philippe Milcent