Abus de pouvoir

Marc Roché et Philippe Safar

Publié le samedi 01 avril 2017

Une planification méthodique dont la finalité est de mettre au pas une profession enviée...
Marc Roché et Philippe Safar

À LA SOP, NOUS SOMMES CONVAINCUS que nos représentants syndicaux auront tout fait pour négocier une convention qui aurait permis à la profession de continuer d’assurer son rôle au bénéfice du patient dans un système de soin à la française.

 

NOUS SOMMES CONVAINCUS QU’ILS AURONT SU SOULIGNER les conséquences catastrophiques d’une trop faible, d’une trop lente valorisation des soins conservateurs couplée au plafonnement des soins prothétiques : dé conventionnement forcé, augmentation du nombre de soins, diminution du temps passé à les effectuer…

Sans oublier, bien sûr, l’inéluctable augmentation du volume de prothèses importées. Une aberration ! Les cotisations de l’assurance maladie vont indirectement financer l’emploi en Asie plutôt que soutenir les « petits » laboratoires de prothèse en France, déjà fragilisés. Et, last but not least, les syndicats ont évidemment argué du risque, quasi écrit, d’une décroissance funeste de l’emploi des assistantes dentaires.Marc Roché et Philippe Safar

 

NOUS SOMMES CONVAINCUS QUE LES ÉTUDIANTS des seize UFR d’odontologie ont, pendant plus de deux mois, fait une juste grève en pointant l’impossibilité dans laquelle ils se trouveront de traiter leurs futurs patients comme ils auront appris à le faire au cours de leurs études.

 

NOUS SOMMES ÉGALEMENT CONVAINCUS QUE LES INTERLOCUTEURS de nos syndicats avaient de longue, fort longue date, compris tout cela. De telle sorte que les arguments, de quelque ordre qu’ils fussent, même d’ordre scientifique, ne pouvaient être recevables pour le froid totalitarisme du chiffre et de la statistique.

 

NOUS SOMMES AUSSI CONVAINCUS QUE LA DIRECTIVE MINISTÉRIELLE qu’a entérinée le règlement arbitral n’est pas uniquement justifiée par des contraintes budgétaires, ni même par des contraintes budgétaires assorties de choix politique. Ce serait là une lecture trop superficielle, trop simpliste, d’intentions non pas empreintes de culture de gauche voulant l’étatisation du système de soin, mais empreintes au contraire de cynisme ultralibéral.

 

CAR NOUS SOMMES CONVAINCUS QUE L’OBJECTIF GESTIONNAIRE est plutôt de décourager l’individu, jugé « ingouvernable », qui est supposé sommeiller en chaque dentiste, et de confier le système de soin à des intérêts privés : investisseurs, groupes, assurances, « mutuelles » qui se font fort de rentabiliser le système de santé à leur profit puisque le corps humain est devenu un nouveau marché.

 

OUI, NOUS SOMMES CONVAINCUS QUE CET OUKASE MINISTÉRIEL résulte d’une planification méthodique dont le but est de mettre au pas une profession enviée. Il s’agit aussi de décourager toute initiative chez les jeunes diplômés qui deviendraient ainsi une main-d’œuvre gagnée par le salariat puisque les plateaux techniques les plus modernes seront aux mains des assurances. Des assurances au service desquelles Marisol Touraine s’est déjà placée avec sa loi dite de modernisation du système de santé.

 

À LA SOP, NOUS SOMMES CONVAINCUS que c’est sur des femmes et des hommes qui aiment leur métier, et pas sur des décombres, que l’on construit un système de santé pouvant garantir un niveau de soin digne d’un pays développé comme le nôtre. Et même si nous vivons cet arbitrage comme un crépuscule, nous ne cesserons pas de peser, comme nous l’avons toujours fait, pour que continue d’exister la diversité des modes d’exercice d’omnipratique. Une dentisterie à l’écoute des demandes, de la diversité des situations, qui sait aussi bien dire non au consommateur qu’aux abus de pouvoir.

 

À LA PROFESSION DE S’ORGANISER. Elle en a les moyens, elle doit en avoir la volonté.

 

Marc Roché, Philippe Safar,

président et président d’honneur de la SOP et son conseil d’administration