NBIC, quatre lettres, une révolution et ses défis

Philippe Milcent (rédacteur en chef du JSOP)

Publié le jeudi 01 décembre 2016

« Cette révolution va toucher tous les secteurs de la vie humaine et, bien sûr, celui de la médecine »
Philippe Milcent

NBIC. QUATRE LETTRES POUR UNE RÉVOLUTION dans le domaine des techno sciences : nanotechnologie, biotechnologie, informatique et cognitivisme (ou intelligence artificielle). Cela inclut la robotique, les imprimantes 3D, les thérapies réparatrices à l’aide des cellules-souches et les hybridations homme/machine. Cette révolution va toucher tous les secteurs de la vie humaine et, bien sûr, celui de la médecine (1).

Les biotechnologies permettront de couper-coller l’ADN dans le but de soigner, mais aussi de modifier, d’améliorer voire d’augmenter les capacités des êtres humains. Avec les nanotechnologies, nous pourrons réparer ou construire, molécule par molécule, des tissus et même des organes avec, en filigrane, la réactivation du rêve de la vie éternelle (2).

Les nanosciences se définissent par « l’étude des phénomènes et la manipulation des matériaux aux échelles atomiques, moléculaires et macromoléculaires… ».

Manipulations ? Mais jusqu’où ? Pour améliorer ou simplement pour guérir ? Le transhumanisme n’est pas loin et avec lui les risques d’eugénisme « positif » et ses possibles dérives. Mais la médecine n’a jamais agi que pour améliorer la nature humaine. Par ailleurs, les nanoparticules sont tellement petites qu’il sera difficile (impossible ?) de maîtriser leur diffusion.

  

LE I DE NBIC CORRESPOND AU BIG DATA, qui rassemble l’énorme quantité de données qui s’échangent sur le net. Parmi elles, il y a les données personnelles : nos goûts, nos opinions, notre état de santé, etc. Bel outil de diffusion du savoir et des informations, certes, mais aussi redoutable arme qui pourrait bien se retourner contre nous.

  

RESTE ENFIN LE C : L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE. De la simple calculette que nous utilisons depuis longtemps au super-robot qui ne se contenterait pas seulement de battre le champion du monde de GO (3), mais pourrait bien nous dominer pour assurer sa propre survie, il n’y a qu’un pas à franchir qui relève peut-être du fantasme, mais mérite tout de même d’être examiné.

Toutes ces révolutions soulèvent des problèmes d’ordre éthique (4) d’abord, mais aussi sociaux, sociétaux, culturels, cultuels, économiques, juridiques, et donc politique. Sommes-nous prêts ? Sommes-nous suffisamment visionnaires pour affronter ces nouveaux défis ?

En cette période préélectorale, au cours de laquelle, au-delà de débats « politiciens », émergent parfois des idées, des visions, des réflexions, qui ont la capacité de nous préparer à ces défis qui vont se présenter à nous, qui se présentent déjà à nous ?

Plus que jamais, le fameux « science sans conscience n’est que ruine de l’âme » de Rabelais trouve ici tout son sens et se révèle d’une redoutable modernité. Dans tous les cas, la meilleure attitude est avant tout, de ne pas être dogmatique, ni laxistes, ni dirigiste, mais seulement pragmatique.

Et surtout, en ne perdant jamais de vue le sens de l’humain (5). Ce pourrait être la devise de la SOP.

 

Philippe Milcent (rédacteur en chef du JSOP)

  

(1) Luc Ferry, La révolution transhumaniste, Plon, 2016.

(2) Laurent Alexandre, La mort de la mort, JC Lattès, 2011.

(3) Le 12 mars 2016, le champion de Go sud coréen Lee Sedol a été battu par l’IA « alpha Go » développé par Google.

(4) Laurent Alexandre et Jean-Michel Besnier, Les robots font-ils l’amour ? Le transhumanisme en 12 questions, Dunold, 2016.

(5) Mais encore faudrait-il définir ce que nous entendons pas « le sens de l’humain » et d’ailleurs, l’humanité a-t-elle un sens ?